Positive Black Soul - 20 ans

Alpha Dia, Dakar, Senegal – PBS, 20 ans déjà ? C’est fou ce que le temps passe vite. Vingt ans, dans la vie d’un homme, ça compte énormément. Moi-même, j’ai du mal à réaliser que cela remonte à 20 ans, ce jour où, jeune collégien, je découvrais (lors des matinées hip hop organisées à Sorano) un groupe composé de deux MC’s, qui m’avaient énormément impressionnés par leur flow et leur grande maîtrise de l’anglais.

Je ne connaissais encore rien de ce groupe, et étais loin de m’imaginer qu’une saga était en train de naître, qui conduirait le groupe en question à écrire l’une des plus belle pages de la musique sénégalaise (oui, il ne s’agit pas que de rap !). Je me souviens encore de ce dimanche d’été (1992 je crois) où pour la première fois, j’ai écouté à la radio la première production discographique du PBS, le son « bagn bagn », où étaient déclamées ces fameuses rimes désormais gravées à jamais dans le livre d’or du hip hop sénégalais « gnoun dou gnou PS, gnoun dou gnou PDS, gnoun gnoy PBS… ».

A vrai dire, c’est presque à la fin du son que je découvris (avec sans doute la même émotion que Christophe Colomb, foulant la terre d’Amérique…) que les rimes déclamées l’étaient en wolof. Oui, je l’avoue, pour moi, c’était un groupe de rap américain qui passait à la radio, et les textes, bien sur, étaient en anglais. Oh que non ! C’était du PBS. Pour moi, c’était le début d’un long compagnonnage musical et affectif avec le PBS.

PBS old school

Comment oublier ce soir (de 1993 je crois) où j’ai écouté pour la première fois l’album « Boul Fale » ? J’avais atterri à Toulouse, pour y mener mes études universitaires, et cet album m’avait été rapporté par un ami qui revenait du Sénégal. Ce soir là, je l’avoue, je n’ai pas dormi : l’album passait en effet en boucle, sans que je ne m’en lasse. Et cela ne s’est pas arrêté à cela. Cet album, désormais, était mon plus fidèle compagnon, et je ne m’en séparais jamais. Mes amis toulousains de l’époque peuvent en témoigner, et d’ailleurs eux mêmes « souffraient le martyre », si je puis dire : en effet, tyrannique que j’étais, partout où j’allais, je cherchais à faire écouter, à imposer même, l’album du PBS (pardon à tous !). Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l’album remix « Boul Fale bou bès » (sorti en 1994) m’empêcha à nouveau de dormir et devint lui aussi mon plus fidèle compagnon. Il me permit aussi de découvrir deux nouveaux groupes très promoteurs : Daara J (ah, quelle voix, déjà, ce Faada !) et Pee Froiss.

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=yKzcwxa2JVE[/youtube]

Je me souviens également de cet après midi de 1995 où, ayant appris la sortie du premier album international du PBS, « Salam », je courus à la FNAC pour me le procurer. « Def lo xam, wokh lo kham, bo teuddé nelaw, nelaw… ». Ce soir, je n’ai toutefois pas pu dormir, pour des raisons qu’il n’est pas difficile de devenir ! Puis ce fut la grande campagne de promo de l’album (pour mon plus grand plaisir du reste…) dans laquelle je m’investis personnellement : auprès de mes amis, des quelques rappeurs toulousains que je connaissais, émission à la radio campus, etc. Cerise sur la gâteau : PBS allait passer à Toulouse dans le cadre de sa tournée française ! Ce fut un moment de joie et un espace de communion inoubliables, surtout qu’en ce qui me concerne, j’avais été sevré pendant toutes ces années d’un concert du PBS. A la fin du concert, je me suis faufilé dans les coulisses, jusqu’à tomber en face des deux MC’s du PBS. Mais c’est connu, dans ces circonstances, un fan (oui, je l’étais) reste tétanisé ! Je n’ai donc rien pu leur dire…

La suite fut comme un long fleuve tranquille : la même joie et le même prosélytisme (d’autres auraient sans doute parlé de fanatisme…) à chaque sortie d’un nouvel album du PBS, la même disponibilité à aller assister (presque) partout en France aux concerts du PBS, etc.
Parmi les dernières productions du PBS, c’est certainement l’album « New-York, Paris, Dakar » (1997) qui m’aura le plus marqué. Incontestablement, c’est avec cet album que le PBS était au sommet de son art, tant par rapport aux flows ou aux textes que du point de vue musical. Aujourd’hui encore, je suis convaincu que si des questions contractuelles n’avaient pas retardé la sortie internationale de cet album (qui est intervenue seulement en 2002, soit donc près de 5 ans après son enregistrement), un succès planétaire aurait pu être atteint.

2575750553_1Apres avoir dit tout cela, on comprendra donc que je ne pouvais pas ne pas être présent au concert des retrouvailles du PBS. Pour avoir fait partie en effet de cette génération qui a été profondément marquée par les deux acolytes, je ne pouvais en effet que regretter (dans un premier temps) l’éclatement du PBS, puis (dans un second temps) me réjouir de la « réunification » des deux monstres sacrés du rap sénégalais. Alors, j’y suis allé, sans hésitation aucune (la seule précaution prise ayant été toutefois de demander à mon épouse … « un avis de non objection » !)

Il n’y a aucun doute, ce fut le plus grand concert de hip hop au Sénégal auquel il m’a été donné l’occasion de prendre part, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, la composition du public. Jamais en effet un concert de hip hop au Sénégal n’a réuni tant de gens, appartenant de surcroit à des générations différentes. Moi-même, j’y suis allé avec un petit frère, qui n’était pas né lors de la création du PBS, mais qui (quelle surprise et quelle découverte ce fut pour moi !), connaissait parfaitement quelques textes des vieilles chansons du PBS.

Ensuite, la participation remarquable de la grande famille du hip hop sénégalais, tant les pionniers (Matador, Yat Fu, Nix, Da Brains, etc.) que la génération intermédiaire (Fata, Amenophis, Simon, Sen Kumpe, etc.) ou la nouvelle garde (Canabasse). Enfin dans les moyens mobilisés, et surtout les petits plus qui ont agrémenté le concert (écrans géants dispersés partout dans la salle, projection d’un mini film avant l’entrée en scène du PBS, etc.).

Tant pis si le concert a connu du retard dans le démarrage (moi-même, j’ai dû quitter le concert vers minuit, n’ayant plus l’habitude de ces concerts marathons !)… Tant pis également si la salle n’était pas la plus indiquée du point de vue de la qualité du son (on avait en effet du mal à bien percevoir les voix, qui étaient « bouffées », et presque imperceptibles !)… Tant pis si quelques groupes ont manqué à l’appel (je pense surtout à Daara J et à Pee Froiss)… La perfection n’étant pas de ce monde, il manquera toujours des choses.

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=k34L_OorMGc[/youtube]

Aujourd’hui encore, je suis content et heureux d’avoir pris part à ce concert, qui m’a, moi aussi, rajeuni de 20 ans ! Merci Awadi, merci Doug E Tee (je sais, aujourd’hui, c’est Duggy T, mais puisqu’on parle du PBS, va pour Doug E Tee !), pour tous ces moment de joie que vous avez procuré à ceux et celles de ma génération au cours de ces vingt dernières années. Vous n’auriez pas existé, on vous aurait inventé ! Salam…

Copyright 2009 – Alpha Dia (Dakar, Senegal) / Africanhiphop.com